Sylvaine, Paris - 03/03/2022 (Photo : François Capdeville)

Un voyage sonore lumineux

La multi-instrumentaliste et chanteuse norvégienne Sylvaine, nous gratifie d’un quatrième opus intitulé NOVA. Nous avons été purement et simplement happés par sa musique atmosphérique qui flirte avec le Black Metal et le shoegazing. Une musique luciférienne envoûtante. [Rencontre avec Sylvaine, par François Capdeville]

Le titre Nova colle parfaitement à l’univers de Tolkien qui s’est notamment essayé à imaginer la langue elfique.  Est-ce qu’il est une source d’inspiration ?

C’est gentil, mais je suis bien loin du talent de Tolkien. Alors, certes, je suis très curieuse du langage, de son processus de construction et de la manière dont elle nous donne un cadre de communication… Et du coup, je pense que l’on a parfois besoin de s’affranchir de ce cadre et de ses repères pour libérer totalement ses émotions. C’est ce que tu retrouves dans le titre Nova. En réalité, je chante comme cela depuis mon premier album.

Dans l’église chrétienne -et peut-être dans d’autres religions-, il y a ce que l’on appelle le chant en langue. C’est-à-dire que parfois les mots ne suffisent plus pour faire des louanges. Saint Augustin parle de Jubilation qui consiste à renoncer de dire avec les mots ce qui vient du cœur...

Je pense que c’est le même processus. Savoir se défaire de ses liens pour laisser chanter les émotions. Cela donne un sentiment de liberté très fort.

Est-ce que Nova reflète ton histoire de ces deux dernières années ?

Chaque album reflète mon état d’esprit à un moment donné. Nova est donc le fruit de ces deux dernières années, marquées par la pandémie et ses restrictions, puisque j’ai démarré son écriture en 2019. Mon album parle des choses qui changent, de transition, de perte de contrôle. J’ai vécu des moments de vide et de solitude. Il faut parfois se résigner à comprendre que la seule constante dans notre vie, c’est le changement. Accepter de vieillir et de ne plus être un enfant. Nova est le témoignage de ce processus de transition

Qu’est ce qui t’inspire dans notre monde ?

Je suis une personne très visuelle. Je suis sensible à la peinture. Je me souviens être allée au musée de l’Orangerie découvrir le travail de Monet sur les Nymphéas. Savoir qu’il reproduisait le même sujet à travers différents prismes de lumière m’a fait une forte impression. En photographie, j’aime beaucoup le travail de portraitiste de Julia Margaret Cameron. J’aime les images, voilà probablement pourquoi j’aime bien Instagram.

 Sylvaine

En parlant de photographie, celles de toi disponibles pour ta promo, au bord de l’eau sont magnifiques…

Merci. Ma meilleure amie est photographe, et a fait cette série en Bretagne. J’aime la mer, ses embruns, son horizon...

Nova est très atmosphérique. Quelles sont tes influences musicales ?

Sans hésitation : Type O Negative. Ado, j’étais attirée par le Doom et le gothique. Et quelle révolution quand j’ai découvert Type O. Leur musique est la fois dark et luxuriante. J’ai un faible pour leur album October Rust. Dans un genre complètement différent, j’ai étudié le minimalisme à l’école, ce mouvement artistique musical qui consiste à bâtir tout un univers sonore à partir d'une ou deux notes

Si tu n’avais pas été chanteuse, est-ce que tu aurais aimée être linguiste étant donné ton intérêt pour le langage ? Une Umberto Ecco (auteur du Nom de la Rose) au féminin.

Oui pourquoi pas ! Tu sais, la musique est aussi un langage. J’ai choisi cette voie, car je peux transmettre mes émotions sans prononcer un mot. J’aurais pu être photographe également.

Quatre albums au compteur et un partenariat solide avec Season of Mist, Sylvaine est un projet qui doit avoir 10 ans. De quoi es-tu la plus fière ?

Ma plus grande fierté est de continuer à faire de la musique. Combien de fois, j’ai eu des doutes et me suis freinée par peur de décevoir ou d’ennuyer les gens. Le fait d’avoir réalisé un premier album est une réussite personnelle. Je n’avais rien dit à personne, parce que j’étais certaine que j’allais me planter. Et pourtant j’ai réussi. Cet album aura changé ma vie pour toujours.

Ton père est batteur, est ce qu’il suit ton travail ?

La musique fait partie de ma vie grâce à mes parents. Ma mère travaillait pour des labels et elle a rencontré mon père lors d’une tournée en Norvège. Il joue de la batterie dans mes 3 premiers albums. Je sais que lorsqu’il disparaîtra, j’aurais quelque chose de lui pour l’éternité. J'aime mes parents. Je suis ce qu'ils m'ont donné.

Que souhaites tu dire aux personnes qui liront l’interview ?

Prenez soin de vous. Ces deux dernières années de pandémie nous ont montré que nous avions besoin des uns et des autres. Même si nos opinions divergent, il faut nous soutenir et nous aimer. Et sinon merci de lire cet interview et surtout prenez le temps d’écouter ma musique. J’espère qu’elle vous plaira.

  Nova, Sylvaine

La petite Note MDF 

L’artiste norvégienne Sylvaine nous gratifie d’un quatrième album d’une beauté époustouflante, à l’image de l’art work qui figure sur l’album. Quelle voix ! Mais quelle voix cristalline ! Fichtre ! Le titre d’ouverture Nova illustrerait parfaitement l’arrivée de Bilbon et de ses compagnons chez les elfes sylvestres. Nova est une merveille spirituelle, un album lumineux, et sombre en même temps. Il y a un côté Luciférien au sens baudelairien. Gros coup de cœur pour Nowhere, still somewhere qui est entêtant. Allez-y les yeux fermés. Incontournable ! [François Capdeville]

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