Of Mice & Men - Echo

Etats-Unis
Auto-production 3 Décembre 2021
Une fois n’est pas coutume, je vais passer l’historique d’Of Mice & Men. Le groupe a subi nombre d’arrivées et départs, au point où on peut les applaudir d’avoir tenu le choc depuis 2009. Par contre, ce qu’on peut dire c’est que les gars ont su construire une vraie identité à un groupe qui, au départ, se noyait un peu dans la vibe emo / metalcore des années 2000. Pour autant, je me revois écouter « Second & Sebring » en boucle durant mon adolescence… Of Mice & Men a toujours été dans le paysage, mais j’ai la sensation que ces dernières années, le groupe s’est véritablement imposé comme un nom qui sort du lot. Prenons l’exemple de « Mushroom Cloud » qui est une vraie pépite de violence !
Parlons un peu d’Echo. Si tout va bien, nous serons bientôt en mesure de clôturer la série des sorties du confinement, mais pas aujourd’hui, car cet album est la compilation de trois EPs sortis durant la pandémie, Timeless (février 2021), Bloom (mai 2021) et Ad Infinitum (décembre 2021). Entendez donc, enregistrement chacun chez soi et aucune chance de défendre les sorties en live. L’album a été entièrement mixé et masterisé par Aaron Pauley, et produit par le groupe lui-même. Du bon fait-maison quoi !
Echo démarre par une jolie montée en tension comme je les aime. On le sent arriver ce riff qui va coller une droite sur tes petites pommettes. On le voit presque venir, comme le train, au loin, tu vois le phare qui se dessine, et plus il s’approche plus tu prends l’ampleur de sa vitesse et de sa puissance, « Timeless » te rentre dedans sans pitié. L’amorce est frappante, mélange de basses puissantes, d’une mélodie de guitare qui annonce à la perfection la teneur d’Echo, et un scream bien senti avant l’arrivée du refrain en voix claire. Attention, place à la minute paroles. Comme tout morceau, je pense qu’on peut y mettre son interprétation. Et la première chose que j’y lis, c’est un espèce de mélange des sensations de la déréalisation, qu’elle soit bien réelle ou imagée comme on pourrait la vivre après un évènement traumatisant. La tournure prise par Of Mice & Men pour évoquer ces maux est tout simplement flagrante de bon sens et vous touchera forcément si vous êtes déjà passés par là.
« Timeless » nous quitte comme il nous accueille, sur un fondu qui nous propulse sans répit vers « Obsolete ». Ce titre se construit sur un schéma assez similaire à son prédécesseur, avec une batterie nettement plus présente, notamment sur la sortie du morceau. Couplet screamé et punchy, refrain plus planant en voix claire. On nous y parle du temps qui passe et de la peur viscérale de devenir obsolète. J’ai bien l’impression qu’on ne va pas discuter de la pluie et du beau temps au sein de cet album !
Echo soigne ses entrées. « Anchor » nous accueille avec une jolie intro qui, encore une fois, nous prépare à prendre son riff fracassant en pleine poire. Mais là où on attend une salve de scream énervés, le titre nous emmène vers des territoires moins familiers. La voix est claire, distante, presque égarée dans une dimension parallèle. La rythmique est quasi électro sur les couplets, metalcore sur les refrains. Ce morceau est définitivement un petit ovni d’Echo.
J’espère que vous avez repris votre souffle car « Levee » est un vrai tsunami qui déferle sans pitié. L’attaque est tribale avec une batterie presque mécanique qui amorce la déferlante. Ce titre est violent et particulièrement bien soutenu par une batterie implacable. Il est aussi intense que les paroles qu’il soutient, récit de la pluie incessante qui s’abat sur le narrateur, emportant tout jusqu’à sa propre personne. Allégorie de la dépression ou encore de la colère divine, chacun y mettra le sens qui lui convient, mais nul doute que ce morceau te tombe dessus des premières notes à ce breakdown final qui t’emporte finalement, ta fragilité d’humain ne te laissant aucune chance face à la vague. Mention spéciale pour l’ambiance sonore pluie et orage, qui nous suit jusqu’à « Bloom ».
Est-ce que je vais trop loin si je trouve que la liaison avec « Levee » est ultra intelligente ? La pluie tombe sur cet homme complètement désespéré, comme elle tomberait sur une fleur dont le but est d’éclore puis de disparaître. C’est toute l’histoire de « Bloom ». Une ouverture comme une prière au caractère éphémère de l’existence. Puis de la prière viennent les questionnements. Une infernale spirale de questions. J’aime particulièrement la dualité de ce morceau. La beauté de l’éclosion impliquant nécessairement la détérioration, la vie qui ne se célèbre et ne puise sa beauté que dans l’existence de la mort. « Bloom » est un vrai poème instrumentalisé.
Même thématique, différente approche. « Pulling Teeth » prend le pas de la violence pour dépeindre l’inéluctable final qui attend toute vie. Le titre est speed, comme s’il voulait cristalliser l’incessante course du temps. Les rythmiques ne s’apaisent que pour accentuer d’avantage la violence du titre sur des breakdowns intenses. Bon, alors pour la petite histoire, j’ai quand même du mal à faire le rapport entre le temps qui passe et le fait de s’arracher une dent.
Pas le temps de se poser. « Mosaic » démarre sur les chapeaux de roue. On est sur une pierre angulaire d’Echo. La rythmique est terriblement prenante. J’imagine sans problème le bordel monstrueux qu’elle doit déclencher en fosse. Et cette guitare qui hurle à la fin du deuxième couplet, sur fonds de ce qui m’évoque franchement la sirène d’ouverture du goulag de Warzone, on en parle ? Ce titre est relativement chaotique dans sa construction mais bon Dieu que ça envoie. En plus, les paroles sont encore terriblement bien écrites. Of Mice & Men nous y parle de sa vision de ce qui constitue un Homme, du bien et du mal en chacun, telle une mosaïque qui nous compose et qui nous traduira au jugement dernier. Ah pas de doutes, les mecs sont des poètes de l’apocalypse.
Aller, on respire. « Fighting Gravity” nous emporte vers des contrées planantes et douces. La voix est délicate, la guitare mélodieuse. C’est un joli intermède au sein d’Echo qui est l’occasion d’une belle démonstration musicale.
Ça va mieux ? Parfait car « Echo » démarre. Ce titre, c’est comme si la violence et la douceur avaient eu un enfant. Vous voyez le tableau ? Une entrée en matière délicate posée sur quelques notes suspendues dans les airs, et boom, les basses entrent en piste et accompagnent le tout d’une puissance dont elles ont le secret. « Echo » est presque expérimentale, avec des passages de discours incorporés donnant au tout une ambiance vraiment spéciale. « Echo » c’est le récit du Big Bang et du CMB. A un moment tout n’était qu’un, puis l’instant d’après tout est éclaté en chaque point de l’univers, et les relents de cette explosion se font encore entendre aujourd’hui, dans un écho infini qui traverse le temps.
J’aime beaucoup la tournure que prend l’album à ce stade. On s’éloigne peu à peu des codes des classiques du genre pour entrer dans une approche plus personnelle. « Helplessly Hoping » ne fait pas exception à la règle. Reprise du titre éponyme de Crosby, Stills, and Nash, avec cet ultime titre, Of Mice & Men nous prend complètement à revers. Le ton est mystique, solennel et empreint d’une pesante mélancolie. Oubliez jusqu’à la notion de métal et tout ce qui la compose dans ce poème instrumentalisé. Une sortie en douceur pour conclure ce très bel album.
J’aime quand un album me laisse penaude et pleine de questions existentielles. Of Mice & Men nous offre une belle démonstration de ses capacités d’écriture et insuffle la rythmique qu’il faut pour valoriser ses textes. Echo est juste, droit, bien ficelé et, à n’en pas douter, il va résonner un bout de temps dans mes enceintes !
AnnaHell
Tracklist
- Timeless
- Obsolete
- Anchor
- Levee
- Bloom
- Pulling Teeth
- Mosaic
- Fighting Gravity
- Echo
- Helplessly Hoping
Lineup
Aaron Pauley (Chant, basse)
Phil Manansala (Guitare)
Alan Ashby (Guitare rythmique)
Valentino Arteaga (Batterie)
Artistes similaires
Memphis May Fire
Wage War
Crown The Empire
Laissez un commentaire