Lorna Shore - ... And I Return to Nothingness

USA
Century Media Records
13 Août 2021
Lorna Shore est un groupe en mouvance permanente qui ancre l’image du bateau de Thésée dans le monde du métal. La formation ne compte aujourd’hui aucun de ses membres d’origine, tantôt ébranlée par des histoires de harcèlement ou encore des départs de membres clés pour d’autres groupes. Pourtant, il serait impensable de ne pas placer Lorna Shore dans la tête de liste des références deathcore.
…And I Return To Nothingness (EP) est donc l’occasion de présenter un lineup tout juste stabilisé, avec Will Ramos (chant), Adam de Micco (guitare), Andrew O’Connor (guitare) et Austin Archey (batterie). Et que dire, à part que Lorna Shore a gagné le gros lot au Mercato des chanteurs de death.
Will Ramos a une capacité à atteindre un scream aigu et digne de créatures infernales qui va chatouiller les entités qui se baladeraient au-dessus de la voute céleste, comme à jeter un growl caverneux terriblement puissant qui doit résonner jusqu’aux enfers. Il possède la panoplie vocale lui permettant de toucher du doigt le meilleur des deux mondes, au point où à la première écoute, on se demande légitimement si Lorna Shore n’aurait pas fait le choix de deux chanteurs.
Ces capacités hors normes jouent énormément sur la qualité de …And I Return to Nothingness. Le voyage, composé de trois morceaux, démarre par la descente aux enfers, littéralement « To The Hellfire ». Et c’est très très bien joué musicalement car ce morceau, d’une manière que je ne m’explique pas complétement, me donne vraiment l’impression de descendre toujours plus profondément dans les entrailles de la Terre. L’amorce est paisible, avec quelques notes de guitare très agréables, rapidement renforcées d’une rythmique plus puissante et d’un scream en background qui annonce la couleur. Une entrée en douceur qui débouche sur une tirade alliant rythmique de batterie soutenue, guitares puissantes et mélodiques et un chant qui démontre les capacités pulmonaires de Ramos. Les cassures rythmiques sont intelligentes car elles donnent du relief au titre, la cadence ralentissant sur des paroles qui apportent une certaine profondeur dans le sens du morceau, le tout dans une ambiance globale très orchestrale et complète. Archey ne semble jamais fatiguer, et toute cette agitation rythmique, accompagnée d’une guitare mélodique qui créée une ambiance vraiment particulière, me donne la sensation d’une chute incessante qui ne s’arrêtera qu’à 5 min 13, dans ce que j’appellerai le crash. Ramos et sa bande ont atteint les entrailles de la Terre et le rythme s’étale dans des enchaînements de breakdowns complètement fracassants, entrecoupés de sons totalement inhumains de la part du chanteur qui me collent encore des frissons à l’heure où j’écris ces lignes. Vous me direz légitimement, rien de surprenant à retrouver des breakdowns qui clouent au sol chez Lorna Shore, ce à quoi je répondrai, allez donc écouter, et donnez m’en des nouvelles.
Le voyage se poursuit par « Of the Abyss ». Ce titre est un requiem à l’insignifiance de notre passage sur Terre et au caractère éphémère de la vie. Le morceau démarre sur la création d’une atmosphère épique qui ne nous lâchera pas pendant les cinq minutes quarante-trois secondes que dure ce titre, avec des chœurs féminins en arrière-plan, le tout dans une parfaite maîtrise. S’il est moins impressionnant que le premier morceau de l’EP, il n’en reste pas moins la démonstration des capacités de Lorna Shore, et ce pour chacun de ses membres. La fin du morceau permet une transition en douceur à la manière d’une bande son en live vers «…And I Return to Nothingness », qui démarre donc de la même façon.
L’ambiance s’est nettement allégée sur ce dernier morceau. La mélodie est à la croisée des chemins d’une partition épique, celtique et viking, ce qui est relativement surprenant. Les chœurs renforcent indéniablement l’aspect épique et le côté « guilleret » du morceau. Mention spéciale au « gong » final qui transporte vers un univers mystique où cette sonorité si particulière est considérée comme étant celle du Big-Bang… ce qui collerait bien avec les paroles de « …And I Return to Nothingness ».
Cet EP est intéressant car il raconte une histoire. On le lit dans le titre des morceaux qui, mis, bout à bout, forment la phrase : To the hellfire of the abyss… And I return to nothingness, mais également, et surtout, à la cohérence des paroles avec l’ambiance musicale qui s’allège au fur et à mesure des morceaux. « To the Hellfire » est un morceau d’une violence sans nom qui symbolise la descente aux enfers, ou la mort. « Of the Abyss » questionne l’après, la futilité de la vie humaine connotée de l’espoir de subsister dans chaque chose. Et enfin, la renaissance, sur « …And I Return to Nothingness ». Tout dans cet EP est cohérent, calculé et maitrisé. On peut se laisser porter par la maîtrise de Lorna Shore sans se poser de questions, se laisser embarquer pour un univers lointain, mystique et pourtant terriblement ancré dans la réalité.
AnnaHell
Tracklist
- To the Hellfire
- Of the Abyss
- ...And I Return to Nothingness
Lineup
Will Ramos (Chant)
Austin Archey (Batterie)
Adam de Micco (Guitare)
Andrew O’Connor ( Guitare)
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